Barcelona!!! 17/18 juillet 2010

Et hop, sortie 13, brève traversée d’une zone industrielle et entrée dans l’enceinte du circuit. En ouvrant le rideau de l’intérieur du box, ça donne ça:

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Là, tu commences par te pincer pour vérifier que tu es dans une phase d’éveil et comme cela ne suffit pas, tu t’assures que le mec qui est à coté de toi voit bien ce que tu vois…

en penchant la tête vers la droite…

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…tu vois ce qui reste de l immense ligne droite des stands, soit 400 bon mètres, dominée par la fameuse tour rappelant un peu celle d’Indianapolis et affichant le classement des 10 premiers, le nombre de tours effectués, l’heure, tous paramètres très utiles pendant la course et en particulier pendant la nuit…

un petit 180°…

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nous habitons au 29, et à l’ intérieur il y a ça:

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Bon, tempérons notre enthousiasme, le jeudi en fin de matinée, la brèle n’a plus de moteur…ou plutot si, il y en a toujours un accroché au chassis, mais il n’y a plus de bielles à l’ intérieur!

La plupart des S1000 au départ vont connaitre un sort similaire, y compris la #10 qui va abandonner à une demi heure de la fin alors qu’ elle était sur le podium…

Sur le paddock on évoque un problème de lubrification des cylindres qui déjaugeraient pendant que la moto est sur l’angle…A confirmer.

tout avait pourtant bien commencé…

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la moto s’avère être très facile d’accès, beaucoup plus, par exemple, que notre R1 2009, à l’image du shifter qui permet (en sélection classique, il faut le souligner) un passage ultra rapide des vitesses sans provoquer un tsunami dans la boîte à chaque fois!

Alors le moteur…super puissant et oncteux à la fois donc facile à exploiter, beaucoup plus que celui d’ une kawa plus rageuse et donc plus pointue. La ligne droite comparable à une piste d’ atterrissage pour 747 est avalée à la vitesse lumière et je me délecte, une fois n’est pas coutume, à déboîter bon nombre de nipponnes…wahou, trop bon!

Puis, alors que que je commence à prendre quelques repères avec une moto mieux réglée, un bruit émane soudain du moulbif au rétrogradage de la ligne droite…le “clac clac clac” est inquiétant, je ramène la teutonne en douceur au box..vous connaissez la suite.

Le SRET 666 n’a pas énormément de moyens, la panne est trop importante pour faire l’ objet d’ une réparation de fortune et nous n’avons pas de mulet…ça sent l’A9 et l’ A75 dans le sens du retour!

c’est sans compter sur la volonté des mes coéquipiers, Martial Mourra (qui est également le team manager) et Marc Leroy qui vont faire preuve d’une force de caractère peu commune. Marc propose que nous utilisions sa moto, un gex K6. Seulement voilà, la brèle en question est une moto de route, se situe à Amiens au nord de Paris et à priori, nous ne disposons ni d’une remorque, ni de l’attelage pour la tracter…

C’est là qu’intervient mon ami Thierry, team manager du très rapide Défi 23, équipe de pointe en CFE depuis plusieurs années. Il propose à deux des ses mécanos de nous venir en aide, et même de nous amener la moto! Le truc un peu dingue séduit Max et Céline (et oui, une fille!) qui sont des personnes tout simplement géniales…et résistantes puisque nos deux saint Bernard vont se démener 15 heures durant sans dormir pour nous livrer la suz’.

Mais la partie est loin d’être gagnée car le boulot à accomplir est énorme. En effet, tout est à faire sur cette moto strictement d’ origine pour qu’elle passe au CT…

vous avez dit contrôle technique?

Ben justement, il est sur le point de se terminer!

Il faut vite aller voir les commissaires, leur expliquer, ils comprendront sûrement!

Dire qu’ils ont été sensibles à notre situation est en dessous de la vérité puisqu’ils ont maintenu en poste une partie de leur staff pour nous laisser le temps de bosser. Pas de doute, on est vraiment au pays de la moto!

S’ensuit une fiévreuse séance de travail au cours de laquelle tout le monde donne son max pour atteindre l’ objectif ultime: préparer cette moto pour être au départ samedi à 15 heures.

Enfin ça y est! tout est en ordre…du moins le croit on…

la tuile! notre moto est refoulée car elle ne dispose pas d’un éclairage additionnel à l’arrière au cas ou le principal tombe en rade. Il faut revoir notre copie, retour au box au pas de course!

Enfin,ce qu’on n’espérait plus se produit: la brèle est validée!

ça tombe bien, la séance qualif débute dans 10 minutes!!! nous sommes vendredi après midi et nous n’ avons, mes coéquipiers et moi, que 8 tours de roulage effectués la veille (et encore, avec une autre moto!) sur ce circuit fabuleux mais ô combien tecnhique! inutile de preciser que pendant tout ce temps, nos petits copains s’en sont donnés à coeur joie et ont enchainé les séances d’entrainement…la qualif est loin d’être assurée car bien sûr, le gex n’ a bénéficié d’aucune mise au point!

ces craintes vont s’avérer justifiées…en effet, dès les premiers tours, nous avons une sensation bizarre au niveau de l’avant…la moto se semble pas travailler comme elle devrait…et pour cause!!!! la fourche est remplie à ras bord d’huile et ne travaille que sur une toute petite partie de sa course normale (à peine la moitié!). Nous résoudrons le problème mais seulement après les qualifs car nous n’avons évidemment pas le temps d’effectuer l’intervention donc il faut faire avec…

A l’issue de la séance, nous nous qualifions…en dernière position! Q’importe, nous revenons de tellement loin, que nous nous en satisfaisons pleinement. Et puis nous n’avons guère le temps d’y penser car dans une heure à peine débutent les essais de nuit. Ce fut encore un grand moment et une grande première pour l’équipage. Rouler la nuit est magique mais si mes coéquipiers se sentent parfaitement à l’aise, ce n’est pas tout à fait mon cas et je suis même franchement gêné dans les endroits du circuit les moins éclairés. Beaucoup de copains (il y a une forte colonie de français issus de l’endurance sur cette course) disent que leurs chronos de nuit sont presque les mêmes que ceux effectués de jour…arf…aucun risque que ce soit le cas pour moi!

Le lendemain, c’est le grand jour et nous avons une première information: nous allons en baver car dès le matin, il fait déjà chaud.

L’ouverture traditionnelle de l’allée des stands au public entre midi et 13 heures est un moment très sympa et si notre moto que voilà…

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…ne recueille pas un succès phénoménal par son look disons un peu…vintage, il n’en va pas de même pour la petite mise en scène que nous avons concoctée et qui se veut symbolique de nos difficultés et nos faibles moyens. Le papier porte la mention: “la charité  pour un pauvre team qui est dans le besoin” ou quelquechose comme ça…cela a fait beaucoup rire une partie du paddock qui s’est pris de sympathie pour nous tant il nous a vus galérer.

LA COURSE

Auteur du meilleur temps de qualifs, il est décidé que je prendrai le départ…c’est un honneur mais aussi une crainte au vu des mes exceptionnelles qualités de démarreur! lol

Les minutes qui précèdent le départ resteront gravées, les tribunes sont quasiment pleines, j’ ai à coté de moi sur la grille de départ ma petite protégée, Little Roo alias Steffie qui est à la tête d’un équipage cent pour cent féminin…

1 minute…

30 secondes…

J’ai les yeux rivés sur le drapeau du directeur de course…dès qu’ il frémit, je fonce…

Et c’est parti!!!!!!!!!!!!

Tout se passe au mieux et pour je ne sais quelle raison, je réussis un pur départ qui me fait gagner une dizaine de places…yessss!

Ayant déjà été fort bavard depuis le début de ce compte rendu, je vais faire bref et ne mentionner que les faits marquants…

Nous effectuons un très bon début de course qui nous fait remonter en quelques heures de la 47ème à la 30ème place…Une 1ère coupure moteur intervient par chance dans l’allée des stands et nous immobilise environ 1/4 d’ heure au stand. Puis retour en piste ou notre équipage très homogène nous permet de reprendre notre marche en avant pour atteindre le 27ème rang, place à laquelle allons nous maintenir  toute la nuit.

Mais que ce fut dur!

je crois n’ avoir jamais souffert autant sur une moto que lors de mes deux relais nocturnes…devoir repartir en s’étant allongé épuisé et après s’être péniblement endormi une demi heure m’a transformé en une espèce de zombie robotisé et presque incapable d’articuler quoi que ce soit de compréhensible. Epuisé, Martial s’ est même éffondré à sa descente de moto à la fin d’un de ses relais…

A noter aussi l’extrême agressivité des pilotes espagnols, en particulier la nuit (du moins l’ai je vécu comme ça) qui n’ attendent pas le virage suivant pour passer, même si c’est un peu limite. Par exemple, dans le dernier virage avant la ligne d’arrivée, courbe rapide en 4ème et en descente, je me suis fait faire l’intérieur alors que mon genou commençait à effleurer le vibreur! je peux vous dire que…ça réveille!

Mais la fin de nuit allait me réserver un autre moment magique: le lever du jour! j’ai eu la chance d’etre au guidon à ce moment là et ce fut une sorte de renaissance après les galères physiques de la nuit. Le plaisir de rouler est revenu en même temps que je retrouvais la vue si j’ ose dire! envolées les douleurs aux adducteurs, au dos, aux avant bras, aux épaules…

Les chronos redescendent, je suis sur le circuit de Catalunya, la journée va être belle, c’est l’ été!

Et au moment ou je me laisse gagner par cette euphorie…la moto coupe brusquement, impossible de redémarrer! les commissaires de piste me dirigent vers la voie de sécurité par laquelle je vais tenter de regagner le box…car le reglement est très clair: je ne peux bénéficier d’aucune aide extérieure et dois ramener ma moto par mes propres moyens…je suis catastrophé par ce coup du sort (encore un me dis je!) qui bousille notre course et qui va peut être nous priver de la ligne d’ arrivée!

Les derniers mètres effectués en légère montée (mais à 7h du mat et en poussant une moto de 200 kg, c’est l’ Everest!) sont un calvaire…enfin, une fois dans l’allée de stands, je peux être poussé par mes mécanos…Les 3 pilotes du team ont d’ailleurs chacun à leur tour connu cette galère car la moto va se faire un devoir de couper à chacune de ses sorties obligeant son cocher à la ramener à la poussette!

La moto ne redémarrera qu’à un quart d’heure de la fin et franchira symboliquement la ligne d’arrivée mais ne sera pas classée car n’ayant pas effectué la distance suffisante…en fait plusieurs dysfonctionnements se sont accumulés pour nous en empêcher: problème de capteur de chute, de fusible, de pompe à essence; rien de très grave en soi mais ces pannes intervenant en série auront eu raison de la #66.

C’est une grosse déception mais cela restera une grande expérience d’abord sportive mais aussi et surtout humaine. Franchir la ligne d’arrivée et obtenir un bon classement comme nous pouvions encore l’envisager à la fin de la nuit en dépit de nos difficultés aurait été gigantesque mais au delà du résultat brut, nul doute que cette course restera un grand souvenir pour tous les membres du team…rendez vous est d’ailleurs pris en 2011 pour…

LA REVANCHE!!!!